Cette contribution s’intéresse à l’originalité de l’introduction de la notion de Réalisme en
politique, par le Guide du Parti de la Vérité pour le Développement, Cheikh Ahmadou
Kara MBACKE, et à la fécondité de ce concept en tant que tel.
En ce qui concerne l’originalité de l’introduction du concept de Réalisme en politique, pour
impulser une révolution culturelle consistant à adapter les idéologies économiques et les
stratégies politiques à nos réalités socioculturelles, il nous suffira d’avouer que c’est la
première fois, après plusieurs années de flirt avec les textes de la Philosophie politique, que
nous rencontrons ce concept en politique, au sens où il est entendu ici.
En ce qui concerne la fécondité du concept, il suffit de songer à l’immense portée qu’a eue
dans l’Histoire des Sciences, l’introduction du concept de Réalisme en épistémologie, par
Henri PUTNAM, dans ses Philosophical papers, pour prendre acte du caractère heuristique
de la notion en tant que telle.
Pour saisir pleinement cette fécondité dans toute son ampleur, il convient de signaler les faits
épistémologiques successifs à l’issue desquels ce concept fut introduit par PUTNAM pour
sauver l’objectivité scientifique :
1- Le remplacement de la notion de certitude par celle de corroboralité provisoire
des théories scientifiques, par Sir Karl POPPER, dans The demarcation between science
and metaphysics, a ébranlé les fondements de l’optimisme méthodologique classique ;
- L’établissement par Thomas KUHN de l’incommensurabilité entre deux théories
scientifiques séparées par un changement de paradigme, dans The structure of scientific
revolutions, finissait de montrer que des chercheurs ne partageant pas la même représentation
du monde, ne parlent pas le même langage, parce que le langage observationnel n’est jamais
neutre, mais est toujours assujetti au paradigme qui le sous-tend, ni ne voient le même monde,
car la vision a une structure propositionnelle, voir, c’est toujours voir que, comme le dit
Norwood Russell HANSON, dans Patterns of Discovery. - La conception linéaire de l’histoire des théories scientifiques, défendue par les
penseurs du Cercle de Vienne, en 1923, fut battue en brèche par Stephen TOULMIN qui
montra que cette histoire est plutôt marquée par des ruptures plus ou moins violentes ; chaque
nouvelle théorie marquant un saut qualitatif par rapport au précédent.
C’est dans ce contexte que PUTNAM introduisit le concept de Réalisme scientifique, pour
sauver l’objectivité des théories scientifiques, alors atteinte d’un sérieux coup de revers. Pour
PUTNAM, la valeur de vérité d’une théorie scientifique (son caractère vrai ou faux), doit
pouvoir se libérer des limites imposées par une représentation particulière du Monde.
C’est ainsi qu’il dit qu’on pourrait imaginer des créatures dont les terminaisons nerveuses
seraient inversées par rapport aux nôtres, de telle sorte qu’elles ressentiraient le chaud là où
nous ressentirions le froid et, réversiblement, que cela n’enlèverait rien à l’irréductible vérité
de l’affirmation que la chaleur résulte toujours de l’agitation moléculaire qui est ce qui est
inscrit dans la réalité elle-même, indépendamment de la représentation que nous pouvons en
avoir.
La fécondité du concept Réalisme en épistémologie n’a rien à envier à son caractère
heuristique en politique. En effet, de la même manière qu’il s’agit pour le Réalisme
scientifique, d’essayer d’aller au cœur de ce qui est inscrit dans la réalité elle-même, plutôt
que de lui plaquer des théories toute faites et préétablies, il s’agit pour le Réalisme politique
africain, de partir des réalités socioculturelles propres à une société particulière, afin d’y
adapter les doctrines et stratégies politiques qui sont destinées à lui être appliquées.
A ce titre, le retard économique accusé par le Sénégal, par rapport à des pays comme la
Malaisie, Singapour, la Corée, sur lesquels il avait une nette avance au moment des
Indépendances, est suffisamment illustratif de l’inadéquation des doctrines et stratégies
politiques importées aux réalités socioculturelles de notre pays.
La crise financière mondiale que nous vivons nous est une des dernières manifestations en
date de la crise de toutes les idéologies occidentales, du Communisme au Matérialisme, en
passant par le Socialisme et le Libéralisme qui ont toutes fini de montrer leurs limites.
A ce titre, notre conviction intime et irréversible est que seules les valeurs issues de l’ISLAM
en général, de la doctrine de Cheikh Ahmadou Bamba en particulier, comme principale
source d’inspiration, dans sa double dimension spirituelle et temporelle, avec une ouverture à
toutes les valeurs positives de l’Humanité, est capable d’assurer notre bien-être et notre
quiétude.